Vues: 663 Created: 2019.04.21 Mis à jour: 2019.04.22

Deux cousins (extraits)

L'urologue

Frédéric trouva plus facilement le cabinet du Dr Tissot. Il vit sur la plaque que celui-ci était bien l’urologue. La lumière était verte, il entra. Le docteur l’accueillit en lui disant :

— Monsieur de Goumoëns, je suis désolé, je dois voir un autre patient en urgence. Vous pouvez vous asseoir et prendre un livre pour passer le temps.

— Je comprends, Monsieur le docteur. Les malades ont la priorité sur les bien-portants.

Frédéric était content, il espérait que la visite serait plus courte. Il suivit le conseil du médecin et regarda les livres dans la bibliothèque. L’un d’eux attira son attention, il était ancien, son auteur était Samuel Auguste Tissot et le titre était L’onanisme, dissertation sur les maladies produites par la masturbation. Frédéric l’ouvrit, c’était une édition de 1769, dédicacée : « À mon cher neveu Joseph, ces quelques conseils pour te détourner d’une bien mauvaise habitude. Ton oncle Samuel. ».

Frédéric transporta avec précaution le livre sur le bureau du médecin et débuta la lecture des pages jaunies. Il se mit à rire à mesure qu’il découvrait toutes les affres que pouvait provoquer l’onanisme. Comment un médecin avait-il pu écrire de telles bêtises ? Il n’entendit pas le Dr Tissot revenir.

— Eh bien, dit celui-ci, je vois que vous avez découvert le livre le plus intéressant !

— Oui, c’est édifiant.

— Il a été offert à l’un de mes ancêtres, ce Joseph de la dédicace.

— Je dois vous avouer que cela ne me paraît pas très crédible, du moins cela ne correspond pas à ce que je vis.

Le médecin s’assit derrière son bureau.

— Je vais tout de suite vous mettre à l’aise, je trouve également ces descriptions exagérées. Ces patients devaient être malades et la masturbation excessive une conséquence, et non pas la cause des maladies. Parlons plutôt de vous, vous devez vous demander pourquoi votre père m’a demandé de vous examiner.

— C’est vrai, il pense peut-être que je me masturbe trop !

— Rassurez-vous, nous n’avons jamais parlé de vos habitudes masturbatoires et vous n’êtes pas obligé non plus de m’en parler, à moins que vous n’ayez une question à ce sujet ou un problème. Tout ce que nous dirons est soumis au secret médical et je n’en parlerai jamais à votre père, que je vois parfois en consultation.

— Il me semble qu’il avait fait une fois une opération pour ne plus avoir d’enfants, j’étais encore jeune et je n’avais pas très bien compris de quoi il s’agissait, même si notre mère nous avait expliqué comment on fait les enfants.

— Puisque c’est vous qui m’en parlez, je peux le confirmer, il avait fait une vasectomie, on coupe les canaux déférents.

Le médecin avait un modèle anatomique des organes génitaux masculins sur son bureau, il expliqua à Frédéric en quoi consistait l’opération.

— J’aime mieux voir un pénis que le crâne de votre confrère, le Dr Zimmermann, dit Frédéric.

— Chacun ses goûts, en effet, nous pardonnons au Dr Zimmermann son excentricité, c’est un médecin très consciencieux et je pense qu’il vous a examiné partout, vous ne serez donc pas surpris si je fais la même chose.

— Je suis cependant toujours gêné, alors que je me moquais de mon cousin ce matin.

— Ne vous formalisez pas pour si peu, tout homme finit par y passer. Nous allons discuter avant, j’ai prévu assez de temps. Vous avez déjà reçu les brochures qu’édite la clinique.

— Oui, j’ai parfois fait des remarques.

— Je le sais, je participe à la rédaction de ces brochures. Vos remarques nous ont été précieuses. Nous avons également décidé d’ouvrir une consultation destinée aux adolescents, dans le but de les aider lorsqu’ils ont des problèmes qu’ils ne désirent pas aborder avec leurs parents.

— En espérant qu’ils reviendront plus tard se faire soigner lorsqu’ils seront adultes…

— C’est assez ambigu, en effet. Nous aidons et soignons, mais nous devons aussi faire du bénéfice. Cette consultation pour adolescents sera cependant sponsorisée par votre père, du moins au début, par l’intermédiaire d’une de ses fondations. Les ados intéressés pourront passer une demi-journée à la clinique et voir un médecin généraliste, un urologue pour les questions en relation avec la sexualité, et aussi un psychologue si nécessaire.

— Et pour les filles ?

— Elles pourront voir un gynécologue pour parler de contraception.

— Et les garçons pourront se faire analyser le sperme ? Je suis déjà au courant, je me suis même porté volontaire.

— Bonne initiative de votre part. L’idée est que les garçons se rendent compte qu’ils peuvent procréer et soient aussi attentifs à la contraception, à la nécessité de mettre des préservatifs. Vous pourrez aller au labo le regarder au microscope. Voilà, je pense que vous avez deviné : nous allons vous demander de donner votre avis, comme pour les brochures, et de faire des suggestions, si vous êtes d’accord.

Frédéric était content que son père s’engageât dans ce programme. Il se demanda si les ados oseraient venir, mais cela valait la peine d’essayer. Il se dit que son père commençait ainsi à l’impliquer dans ses affaires et il en fut fier. Il lui demanderait des détails au sujet de cette fondation.

— Je suis d’accord de participer, fit Frédéric.

— Parfait, votre père était sûr que vous seriez d’accord. Nous allons commencer. Je dirai tout d’abord aux ados que ce n’est pas une visite médicale obligatoire, comme à l’école, qu’ils peuvent refuser n’importe quel examen et que je ne communiquerai aucune information aux parents, à moins qu’ils ne le désirent. Ils n’osent peut-être pas raconter quelque chose eux-mêmes, je pourrais le faire à leur place.

— Vous diriez à mes parents que je suis homosexuel si je vous demandais de le faire ?

Le Dr Tissot hésita, puis dit :

— Bonne question, merci de l’avoir posée. Je vais la noter et nous en parlerons à la prochaine séance du groupe de travail responsable de ce projet.

— Vous ne pouvez pas me répondre tout de suite ?

— Un instant.

Le médecin prit un bloc de papier et y inscrivit la question de Frédéric. Il dit ensuite :

— Je pensais surtout à un problème physique, à une maladie, que je pourrais annoncer aux parents sans les voir, en leur écrivant une lettre ; ou alors pendant le bilan final auquel les parents seraient conviés, si l’ado le désire, bien entendu.

— Un problème physique comme mon cousin qui a de la peine à décalotter ?

— Exactement. Vous avez l’air au courant des soucis de votre cousin, ajouta le docteur en riant.

Frédéric rougit et balbutia :

— Euh… Nous avons… Nous n’avons pas suivi les conseils de votre ancêtre, si vous voyez ce que je veux dire… ensemble.

— Je vois, comme je vous l’ai dit, je ne partage pas du tout son avis. Je continue. Je ne pourrais pas annoncer à des parents l’homosexualité de leur fils par une lettre, vous imaginez : « Madame, Monsieur, nous avons l’honneur de vous annoncer que, pendant sa visite médicale, nous avons découvert que votre fils préfère les garçons aux filles. » D’ailleurs, l’homosexualité n’est pas une maladie, même si le manuel américain des troubles mentaux, le DSM, l’inclut toujours dans sa liste. Le psychiatre de la clinique est aussi de cet avis.

— Alors, aucune possibilité de le dire aux parents ? demanda Frédéric.

— C’est une décision personnelle de l’annoncer ou pas. Par contre, je pense que cette annonce pourrait se faire en présence d’un psy ou d’un autre médecin, cela pourrait éviter des réactions violentes de parents homophobes, et l’adolescent aurait une personne à contacter si ça se passait mal par la suite. Serait-ce un problème pour vous de l’annoncer à vos parents si vous étiez homosexuel ?

— Non, après avoir entendu ce mon père entreprend avec sa fondation, je ne peux pas m’imaginer que ça le dérangerait.

— Vous savez, lorsqu’il s’agit des autres, on est tolérant. Avec ses propres enfants, c’est différent. L’heure tourne, nous devons continuer. Je ne vais pas vous demander si vous avez des éjaculations, vous me l’avez déjà laissé entendre.

— Et si un ado n’y connaissait rien ? Ne savait même pas ce que c’est de se masturber ?

— J’ai prévu quelque chose, je vais vous montrer.

Le Dr Tissot se leva et sortit un autre modèle anatomique d’une armoire. Celui-ci semblait plus ancien et le pénis était en érection.

— Encore un héritage de mes ancêtres. Nous sommes médecins de père en fils.

Le modèle était en deux parties, le médecin les sépara afin de montrer à Frédéric les organes internes. Il expliqua le mécanisme de l’érection et le chemin qu’empruntaient les spermatozoïdes lors de l’éjaculation. Le jeune homme fut intrigué par la prostate.

— Je ne connaissais pas cette glande, dit-il.

— Ce n’était pas prévu car vous êtes trop jeune, mais je peux vous la faire découvrir, si vous êtes d’accord.

Le médecin expliqua ce qu’il allait faire. Frédéric hésita, puis acquiesça, le dermato lui ayant dit de ne pas avoir honte de son corps. Il pensa, qu’un jour ou l’autre, il aurait autre chose qu’un doigt dans son fondement.

Le Dr Tissot se leva, mit des gants. Frédéric baissa spontanément son pantalon et son slip. Le médecin lui examina d’abord le pénis, rétracta le prépuce, tâta les testicules et vérifia l’absence de hernies. Frédéric dut ensuite poser ses avant-bras sur la table d’examen. Le toucher rectal fut assez long, afin que l’ado pût découvrir quelques sensations nouvelles qu’il trouva un peu désagréables. Il avait cependant une demi-molle qu’il exhiba sans fausse pudeur, après que le médecin avait ressorti son doigt du rectum en disant :

— Voilà, vous savez où est la prostate maintenant.

— Oui, c’était très instructif. Vous ferez la même chose à mon cousin, j’espère pour lui.

— S’il accepte. Je vais encore vous nettoyer.

Le médecin prit deux feuilles de papier et essuya le pénis de Frédéric, duquel avaient coulé des fluides, ainsi que son anus, pour enlever le lubrifiant.

— Je ne peux pas vous garder plus longtemps, j’ai déjà du retard et un autre patient attend. Je note qu’il faudra prévoir plus de temps. Si vous voulez revenir plus tard…

— Non, je crois que nous avons fait le tour de la question. Et je dois encore fournir un échantillon de sperme avant 16 heures.

Frédéric se rhabilla, salua le médecin et quitta le cabinet. Il avait hâte de retrouver son cousin.

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Woyzeck Il ya 6 ans  
Pecan nutjob Il ya 6 ans  
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clyso Il ya 6 ans  
arthur Il ya 6 ans  
Woyzeck Il ya 6 ans  
claude Il ya 6 ans