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Curiosités malvenues

Maître Ravaudet

Les bourgeois ont souvent des loisirs coûteux. Les gens du peuple, eux, doivent faire dans l’économie ; et quoi de plus économique et distrayant que de cancaner ? Et même de cancaner sur la vie des bourgeois qu’ils servent. C’est ainsi que Josette et Germaine échangeaient gaiement, tout en tricotant.

« Chez les Ravaudet, c’est madame qui porte la culotte. », fit observer Germaine. Josette sourit. Le prospère notaire était sans doute chef dans son étude, mais n’était pas chef chez lui…

« À propos de Maître Ravaudet et de culotte… Ah mais non, non, ça ne se dit pas.

— Josette… Ne fais pas ta cachottière. »

Josette aimait parfois se faire un peu prier, sous prétexte de préserver la décence.

« Si tu insistes. Alors tu sais que quand j’étais jeune fille, j’ai été bonne à tout faire chez ses parents. Sa mère, c’était une sacrée personnalité… Un jour je devais passer faire sa chambre et j’ai entendu qu’elle lui passait un savon. Il était étudiant à la ville, il était de retour pendant les vacances de l’université, et elle lui reprochait de ne pas assez travailler son droit. « Tu nous coûtes cher ! Tu gâches nos espoirs ! Fainéant ! » et tout le toutim. Je suis repartie. Quand je ne l’ai plus entendue gueuler, je suis revenue… Je suis passée par la petite porte du couloir de service qui donnait dans le cabinet de toilette, et là je me suis rendu compte qu’en fait la mère n’était pas partie, on entendait des petits bruits. La porte entre la chambre et le cabinet de toilette était entrebâillée… Et là j’ai vu… oh Germaine…

— Allez, raconte, raconte.

— Mme Ravaudet donnait le fouet à son fils !

— Le fouet ?

— Oui ! Il était penché sur son bureau, le pantalon aux genoux, cul nu, et elle lui donnait le martinet !

— Maître Ravaudet fouetté comme un garnement ?

— Oui ! Il devait avoir quoi, 19 ans ? Et les fesses déjà roses !

— Et qu’as tu fait alors ?

— Je ne voulais pas que Mme Ravaudet sache que j’étais là alors je suis ressortie et j’ai continué d’écouter. Elle lui a mis une sacrée tannée, il couinait « maman, maman, je travaillerai » quand elle a arrêté. »

Les deux commères tombèrent d’accord que si une bonne fessée au martinet lui avait permis de devenir un prospère notaire, alors c’était plutôt un bien. Et même s’il avait fallu plusieurs fessées.

Une idée vit alors à Josette. « Tu penses que sa femme… tu penses qu’elle lui donne la fessée ?

— À son âge ?

— C’est toi qui m’a dit que c’était elle qui portait la culotte. »

La pensée du notable en train de se faire corriger par son épouse à forte personnalité égaya les deux commères.