Scénettes piquantes
Les dessous chics
Depuis son bureau cossu, Victoria Jackson, cadre suprême (et suprêmement redoutée), règne sans partage sur le service commercial de la grande entreprise. Derrière l’imposant meuble en acajou, s’étale les preuves de sa domination : diplômes encadrés, trophées rutilants, et une photo de son chihuahua en costume d’affaires.
Victoria, la quarantaine assumée comme un compte en banque suisse, est toujours impeccable, comme en témoigne sa tenue du jour : veste tailleur noir ("power dressing" oblige), chemisier blanc immaculé ("non, je ne mange jamais de spaghetti"), jupe crayon qui sculpte ses hanches avec la précision d’un contrat à 6 chiffres, et bas de soie tendus à mort par des jarretelles qui se laissent deviner.
L’atmosphère studieuse – entre séminaire de motivation et tribunal militaire – est soudain troublée par un grattement feutré à la porte. Sans attendre de réponse, le buste de Lauren, sa secrétaire personnelle, une experte de survie en milieu hostile, se profile dans l’entrebâillement :
« Mrs. Jackson ? L’infirmier est arrivé … »
« Faites-le entrer. Merci Lauren, ce sera tout. »
Sans même daigner lever les yeux de ses dossiers, Victoria enchaîne, d’une voix aussi froide qu’un Excel oublié à minuit :
« L’ordonnance est sur la table de réunion, jeune homme, à votre droite. Préparez l’injection, je suis à vous dans un instant » Elle consulte une montre qui coûte plus cher qu’une voiture. « J’ai une réunions dans trois minutes. »
Toujours plongée dans ses documents, elle parcourt les pages d’un regard laser, rayant, annotant, lançant des "Non ! Pas comme ça !" rageurs. Les chiffres ayant l’impudence de ne pas répondre à ses attentes.
L’infirmier hausse les épaules, l’air aussi déboussolé qu’un stagiaire face à une machine à café haut de gamme. « Bon, ben … encore une journée normale dans le monde merveilleux des cadres stressés », se dit-il. Jeune, frais et visiblement encore naïf (à peine vingt-cinq ans, le pauvre), il serre contre lui sa grosse sacoche médicale.
Ses lunettes glissent inexorablement sur son nez luisant de sueur – merci, la clim réglée sur "sibérien" – et il manque de s’étaler de tout son long sur le tapis persan ("Parfait, en plus de jouer les figurants dans ‘Le Diable s’habille en Prada’, je vais mourir étouffé sous un bout de laine à 10 000 euros"). Mission du jour : administrer une injection sans faire hurler la diva du 4ème étage.
Il pose sa sacoche sur la table, attrape l’ordonnance et lit :
« Exacilline® 20 mg – une injection, voie IM. »
L’infirmier connaît ce médicament. C’est un anti-nauséeux. « Logique, avec une patronne comme ça, tout le service doit avoir l’estomac en vrac. »
Il ouvre la boîte et, comme prévu, y trouve :
Un flacon de poudre blanchâtre ("médicament ou coke pour business angels ?")
Une ampoule de sérum physiologique ("Enfin quelque chose de sain dans cette pièce")
Avec une dextérité protocolaire, il enchaîne les étapes :
Sortir la seringue de son emballage plastique ("Ah, ce petit ‘crac’ satisfaisant…")
Casser l’ampoule de sérum phy en protégeant ses doigts ("Parce que se trancher une artère en présence de Mrs. Jackson ? Très mauvaise idée.")
Aspirer le liquide dans la seringue ("Glouglou zen")
Piquer l’aiguille dans la rondelle caoutchoutée du flacon ("Résistance… mais pas autant que le regard de Victoria")
Injecter le solvant et agiter vigoureusement ("Shaker, mais sans le sourire du barman")
Observer la solution d’un regard d’alchimiste ("Pas un grain, pas un flocon… sinon, c’est ma tête qui va rouler")
Ré aspirer le tout dans la seringue ("Et voilà, prêt pour le chef-d’œuvre : ‘La piqûre qui sauvera (peut-être) ma carrière’")
« Bon … allez, Peter, respire. Dans cinq minutes, tu seras sorti de ce thriller corporate. »
Les dernières bulles d’air évacuées, Mrs. Jackson se lève comme si son fauteuil venait de lui envoyer une décharge électrique.
« Allons-y, ne perdons pas de temps. »
« Bien sûr, Mrs. Jackson, je vais me dépêcher … »
« Vous piquez où ? » Demande-t-elle, avec le même calme que si elle commandait un café.
« Dans … dans la fesse, si vous le voulez bien. »
Efficacité, rapidité, absence totale de pudeur. En deux pas de mannequin en colère, Victoria rejoint la table, se contorsionne avec la souplesse d’une yoga addict et relève sa jupe au-dessus de sa taille, comme si elle enlevait un manteau.
« Débrouillez-vous, écartez ce qui gêne, mais faites vite. »
Peter, lui, est en plein short-circuit, joues empourprées, yeux écarquillés et sueur froide.
Sous la jupe, révélation : une culotte en dentelle noire et le porte-jarretelles assorti.
Le jeune homme déglutit bruyamment – on entend presque le "GLONK" dans la pièce – mais tente de reprendre le contrôle de ses fonctions cérébrales.
« Je vais … euh … un peu dégager la zone d’injection », marmonne-t-il, la voix aussi stable qu’une girafe sur un trampoline.
Il s’approche, hésitant comme un chat sur un parquet ciré, et tend une main vers la culotte. Mission pleine de danger : dégager l’élastique sans déclencher une catastrophe.
Avec des gestes de démineur, il tire le tissu vers le bas … mais une jarretelle, tendue comme la corde d’un arc, bloque l’accès.
« Pas … pas de panique… » S’encourage-t-il mentalement, « Il suffit de tirer dessus. »
Ça ne suffit pas.
Il tente l’opération comme un jongleur maladroit :
La main gauche retient l’élastique ("Ne lâche pas, soldat !"), la main droite se tend vers la seringue ("J’y suis presque … presque …")
Mais la seringue est trop loin. Dans un effort désespéré, il s’étire comme un yoga raté … perd l’équilibre … et …
TWANG !
La jarretelle claque comme un élastique de slingshot, la culotte, solidaire, remonte, et l’infirmier réalise qu’il vient de perdre une bataille contre la lingerie haut de gamme.
« Essayons autre chose … » Murmure-t-il, plus pour sa santé mentale que pour Victoria.
En se retournant vers la table, son coude transformé en bulldozer renverse une tasse de café oubliée.
SPLASH !
Le liquide noie une pile de documents (probablement des contrats vitaux ou des CV de stagiaires sacrifiés).
« AHH—! » (Cri étouffé, version "Je vais mourir")
Il attrape des compresses comme si c’était des parachutes, mais ne fait qu’étaler l’encre, en une œuvre d’art abstrait.
Victoria, imperturbable (et visiblement divertie), lâche :
« Laissez tomber les documents. Concentrez-vous sur l’injection. »
« Oui, oui, pardon, Madame ! » bafouille-t-il, rouge comme une tomate sous UV.
Troisième round.
Il saisit une compresse propre ("Enfin, quelque chose qui obéit !") et souffle un bon coup comme un plongeur avant le grand saut.
La main gauche tire l’élastique ("Allez, mon pote, tiens bon cette fois"), la main droite tamponne la peau … enfin, à moitié la peau, à moitié la dentelle, dans un geste si maladroit qu’il grimace avant même que Victoria ne puisse le faire.
« Finissons-en », se dit-il, déterminé comme un stagiaire face à une photocopieuse récalcitrante.
Il fait passer la compresse dans la main gauche ("Multi-tasking level : expert")
Tend le bras vers la seringue …
TWANG !
L’élastique lui échappe à nouveau, la culotte remonte comme un rideau de fer, et Peter lâche un grognement digne d’un joueur de Fortnite éliminé.
Victoria, pour la première fois, craque. Un petit rire cristallin s’échappe, "comme un carillon dans un champ de bataille".
« On dirait que vous luttez contre un adversaire redoutable. Je vais vous aider. »
Sans attendre (parce que visiblement, elle gère même les crises des autres mieux qu’eux), elle passe à l’action :
Une main pour maintenir la jupe ("Classy, même en mode urgence médicale"), l’autre main écarte l’élastique et la jarretelle avec la précision d’un ingénieur en lingerie fine. Et tout cela en aveugle.
« Allez-y maintenant », dit-elle, un sourire en coin qui en dit long ("Ah, la jeunesse…").
L’infirmier, rouge écarlate ("Tomate ? Non, piment d’Espelette"), murmure un « Merci, Madame » à peine audible (comme si ses cordes vocales aussi avaient honte).
L’Heure de Gloire (enfin) :
Tamponnage réussi ("Sans dentelle cette fois, hourra !")
Injection en mode chirurgien de guerre → pschitt ! Propre, rapide, sans douleur (enfin, pour Victoria)
« C’est fait ! » annonce-t-il, triomphant comme s’il venait de résoudre la crise des subprimes.
Victoria rajuste sa jupe avec l’élégance d’une reine remettant sa cape.
« Parfait. Merci pour vos efforts. »
Avec un twang ! final digne d'une corde de harpe, la culotte reprend sa place - comme si rien ne s'était passé (à part la dignité pulvérisée de l’infirmier). Mrs. Victoria lisse sa jupe avec la grâce d'une panthère qui vient de jouer avec sa proie avant de la relâcher.
L’infirmier, en mode "fuite avant la prochaine catastrophe", range son matériel avec la dextérité d'un écolier pris en flagrant délit. Il renverse une compresse ("Bien sûr, pourquoi pas ?"), se penche pour la ramasser ... et manque de s'étaler de tout son long.
Victoria, l'œil pétillant, lance comme on jette une fleur :
« Vous avez du potentiel. Avec un peu d'entraînement, vous maîtriserez même les porte-jarretelles. »
(Sous-entendu : "J'ai hâte de voir ça. Inscrivez-moi pour la séance d'essai.")
Peter, rouge jusqu'aux oreilles, balbutie :
« Je ... je vais m'exercer, Madame … »
Il s'éclipse rapidement, sacoche serrée contre lui comme un bouclier.
Peter déboula hors du bureau de Victoria comme si les portes de l’enfer venaient de se refermer derrière lui. Ses joues avaient la couleur d’un feu tricolore bloqué au rouge, ses mains tremblaient encore, et ses lunettes menaçaient de glisser de son nez en sueur.
Lauren, la secrétaire aussi élégante qu’un couteau suisse en costume, l’attendait au passage.
"Tout s’est bien passé ?" demanda-t-elle, les sourcils interrogateurs.
L’infirmier opina du chef – un mouvement si saccadé qu’on aurait cru qu’il venait de se faire électrocuter. Aucun son ne sortit de sa bouche, mais son visage parlait pour lui : "J’ai survécu, mais à quel prix ?"
« Parfait, parce que j’ai besoin du même traitement. »
Peter cligna des yeux.
« Vous … aussi ? »
« Même restaurant, même plat, même nausée », expliqua-t-elle en tapotant son estomac. « Mrs. Jackson et moi partageons tout. Même les intoxications alimentaires, apparemment. »
Elle se leva, ajustant sa jupe crayon comme une guerrière préparant son armure, et lui fit signe de la suivre dans son bureau personnel d’un mouvement de main qui n’admettait pas de refus.
« Mon bureau est par ici. On sera plus à l’aise. »
A l’aise ? MOI ?
Peter obéit comme un condamné marchant vers l’échafaud, ses semelles crissant sur le parquet avec une résignation audible.
Une fois dans l’antre de Lauren – un espace aussi impeccable que son tailleur – L’infirmier vérifia l’ordonnance (même médicament, même dosage), prépara la seringue (avec des gestes cette fois moins paniqués mais tout aussi maladroits), puis inspira profondément.
« L’injection se fait dans la fesse », déclara-t-il, comme un présentateur météo annonçant une tempête.
Lauren eut un petit sourire en coin : « Très bien. » Puis, avec la même désinvolture que Mrs. Jackson, elle releva sa jupe de tailleur.
Catastrophe !
Elle ne portait pas une culotte classique.
Non.
C’était un body.
Un body intégral en dentelle noire.
Sans ouverture à l’entrejambe.
Peter blêmit. Ses yeux passèrent frénétiquement du body à son matériel médical, puis au plafond.
Pourquoi moi ? Pourquoi aujourd’hui ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ?!
Résigné, l’infirmier tira sur le tissu, essayant de dégager une fesse.
Le body ne bougea pas d’un millimètre.
«Je... euh... c’est très ajusté… », bégaya-t-il, la voix aussi tendue que le tissu en question.
Lauren soupira, agacée par cette complication vestimentaire. "Oui, c’est du sur-mesure. »
Cette information n’aida en rien la circulation sanguine de Peter, qui sentit ses genoux faiblir.
Bien sûr. Parce qu’une culotte normale, c’était trop simple.
Il tira plus fort, les doigts tremblants, essayant de faire glisser le tissu sur le côté.
Le body résista comme un bunker.
« Je … je ne pense pas que ça va marcher », avoua-t-il, déjà en nage.
Lauren croisa les bras.
« Alors, on fait comment ? »
Peter hésita, rougit encore plus (si c’était possible), puis lâcha le plus timidement du monde :
« Il faudrait … euh … retirer le body ? »
Lauren éclata de rire.
« Vous n’êtes pas sérieux ! Ça va prendre un temps fou ! Mrs Jackson m’attend !»
Je préfèrerais avoir à creuser un tunnel sous le bâtiment.
« Le bras, ça ne suffit pas ? » proposa Lauren.
Peter secoua la tête.
« Non, le médicament doit être injecté en profondeur. Le bras, ça n’ira pas. »
Un silence tendu s’installa, rompu seulement par le tic-tac audible de la montre de Lauren et les battements cardiaques précipités de Peter.
Soudain, une lueur de détermination apparut dans les yeux de la secrétaire. Avec la précision d’un escrimeur, elle ouvrit son chemisier d’un geste vif, faisant sauter les boutons comme autant d’obstacles inutiles. Puis, dans un mouvement qui fit vaciller les dernières certitudes médicales de Peter, elle baissa l’un des bonnets de son body, exposant un sein généreux.
« Voilà », déclara-t-elle avec l’assurance de quelqu’un qui venait de résoudre une équation complexe. "J’espère qu’il y a assez ? »
Peter devint alors une étrange créature mi-homme mi-tomate cerise, son visage atteignant des nuances de rouge jusqu’alors inconnues de la science. Ses mains tremblèrent si violemment que la seringue faillit lui échapper.
"Je... euh... oui... bien sûr...", bredouilla-t-il, fixant désespérément un point imaginaire ferrière l’épaule gauche de Lauren.
Avec une concentration digne d’un moine copiste médiéval, il désinfecta la zone d’un geste rapide, puis planta l’aiguille dans le sein avec la détermination d’un homme qui sait que sa carrière – et peut-être sa vie – dépendent de ce seul instant.
« C’est fait », annonça-t-il dans un souffle, retirant l’aiguille comme on retire une épée d’un rocher.
Lauren remonta son bonnet et referma son chemisier avec la même efficacité qu’elle classait les dossiers. « Merci. Vous vous débrouillez finalement plutôt bien », commenta-t-elle tout en vérifiant son reflet dans la vitrine d’un cadre.
Peter, quant à lui, ramassa son matériel à la vitesse de l’éclair, le jetant en désordre dans sa sacoche, et se précipita vers la sortie.
« Bonne journée Miss », lança-t-il dans l’ascenseur.
C’est décidé, je change de métier. Gardien de phare. Ermite. N’importe quoi.