Anonymous
1 members like this


Vues: 1424 Created: 2013.02.18 Mis à jour: 2013.02.18

La prison des femmes

Chapitre 1

Furieuse contre son mari, Coralie jette son sac à main sur le canapé du salon, abandonne le téléphone sur la table basse et fonce vers sa chambre en pleurant. Elle avait tout préparé pour que cette soirée soit spéciale, elle avait convaincu sa mère de garder ses enfants, elle avait investi dans une manucure et une épilation soignée du maillot, revêtu sa plus fine lingerie, un chemisier presque transparent à force d’être blanc, le tailleur chanel des grands soirs …

Ce jour là est un jour spécial. LE jour du dixième anniversaire de son mariage avec Lucas, ingénieur commercial très amoureux d’elle il y a quelques années, aujourd’hui perpétuellement débordé, toujours en retard à cause de clients à prospecter, à inviter, à cajoler …

Mais pour elle, rien.

Même ce soir.

Eperdue de chagrin, les joues striées de larmes, elle laisse la détresse l’envahir, et s’abandonne à la tristesse. Son regard se perd dans les perles de cristal qui constellent le lustre de leur chambre, pendant que résonnent encore en elle les mots de son mari.

Non, ma chérie, pas ce soir. Ce soir je ne rentre pas. Je suis désolé. Non, je vais passer le week end avec un client. Oui, tout le week end. Je rentrerais lundi soir, après le travail. Il faut que je te laisse, on m’attend. C’est pour mon boulot, un client vraiment important.

Important ! Plus important que moi ? Plus important que notre anniversaire de mariage ?

Coralie avait fondu en larme en même temps qu’elle était entrée dans une rage folle.

Contre lui. Contre elle.

Il se défilait, il était un peu plus absent chaque jour, elle restait là, elle l’attendait, elle comprenait, elle était patiente, aimante.

Elle était trop conne.

Elle voyait, mais elle ne voulait pas voir.

Elle voulait protéger son couple, ne pas détruire ce qu’ils avaient construit en dix années de mariage. Les enfants, leur appartement du 1er arrondissement …

Pourtant elle n’en était plus au stade des simples doutes : elle savait.

Les parfums étrangers sur ses chemises. Les cheveux étrangers sur les épaules de sa veste. Les traces de rouge à lèvre sur son pantalon ! Et puis son air perdu, ailleurs, lorsqu’ils dinaient en tête à tête. Les silences pesants, étouffants. Et quand il n’y avait pas le silence, ses mots calculés, pesés, contrôlés.

Lucas la trompait. Elle savait, et elle ne disait rien, pour ne pas le perdre.

Non pas qu’elle acceptât.

Simplement elle n’y pouvait rien et prenait les miettes qu’il lui laissait en espérant sauver ce qui pouvait encore l’être.

C'est-à-dire au final pas grand chose.

Mais quelle conne elle était.

Dire qu’elle s’était préparée, maquillée, épilée … tout ça pour un imbécile qui ne la regardait plus.

Coralie s’assoit sur le bord de son lit et secoue la tête pour reprendre ses esprits. Elle doit agir. Tout de suite. Elle ne peut pas rester comme ça sans rien faire. Elle ne peut pas passer la soirée toute seule à se morfondre.

Il va baiser ailleurs. Très bien.

Qu’est ce qui l’empêche d’en faire autant ?

Rien.

Alors c’est décidé : elle y va.

Ce soir.

Elle s’assoit devant sa coiffeuse, essuie ses larmes, ajuste sa coiffure, retape son maquillage. Inspecte son apparence.

Elle enlève son chemisier, dégrafe son soutien gorge et le laisse choir sur le sol. Ses seins sont tout petit, tout rond. Rien que d’imaginer ce qu’elle s’apprête à faire de sa soirée, ses tétons durcissent tout seul et un sourire lui monte aux lèvres.

Les larmes sont vite oubliées. Tu es une vraie salope, ma chérie.

Elle s’envoie un clin d’œil dans le miroir et renfile son chemisier. Ce soir, pas de sous vêtement, ce n’est pas la peine.

Elle ne boutonne que très peu de bouton, pour le laisser aucun doute à ceux qui se poseraient la question sur la liberté de ses seins. Ils sont peut être petits, mais elle sait pertinemment qu’ils sont très émouvants pour certains hommes.

Ses jambes sont gainées de bas d’un blanc délicat, maintenus en place grâce aux merveilles de cette invention faussement attribuée à Gustave Eiffel, le porte jarretelle. Blanc, lui aussi, encadrant son ventre redevenu plat grâce à la pratique intensive du sport, mais aussi grâce à une volonté de fer.

Coralie hésite un instant, et finalement garde sa culotte de dentelle blanche. Elle a couté assez cher pour qu’elle la garde un peu sur elle. Et puis surtout, elle épouse merveilleusement ses formes intimes et laisse deviner un sexe intégralement épilé, un sexe affamé d’avoir été délaissé depuis de trop nombreuses semaines, un sexe assoiffé de coups de langue et de coups de boutoir …

Coralie ajuste sa jupe droite autour de sa taille, enfile sa veste de tailleur, et chausse ses Louboutins flambant neuves. Un caprice. Une folie. Pas vraiment confortables, mais tellement sexy.

Son mari va passer le week end chez sa pute. Alors elle va le passer à faire la folle.

L’idée, c’est de donner une bonne leçon à Lucas. Lui faire croire qu’elle est partie. Le faire paniquer, stresser. Le faire flipper au point qu’il revienne à la maison avec sa queue d’ingénieur commercial entre ses jambes de coureur de jupons.

Alors elle prend son téléphone et appelle Lucas. Messagerie, évidemment. Ce n’est pas grave. Elle prend son souffle et débite son boniment :

Lucas, c’est moi. Bon. Je vais pas te mentir. Je sais tout. Je sais que tu te tapes une pute alors que tu essaies de me faire croire que tu es au boulot. Alors j’ai décidé de faire pareil. Je vais m’éclater. Tout le week end. Me faire baiser par un homme. Par un vrai mec. Un type qui a une bite et qui sait s’en servir. Enfin quelqu’un pas vraiment comme toi, quoi. Bon. Je renterais peut être lundi ou mardi pour prendre quelques affaires. C’est pas la peine de me rappeler, je ne prends pas mon téléphone. Je te raconterais peut être comment je me suis fait baiser. Ça pourra certainement t’apprendre des choses.

Coralie raccroche. Elle a le cœur qui bat, elle est essoufflée, et elle n’en revient pas de tout ce qu’elle vient de dire à son mari. Et avec quelle vulgarité en plus !

Comme elle l’a annoncé, elle se déleste de son portable et de ses papiers. Autant ne pas se charger inutilement. Elle prend par contre pas mal d’argent liquide qu’elle roule dans son sac à main. Elle va avoir des dépenses, elle se sait déjà : elle est prête à se payer un gigolo pour le week end.

C’est le premier objectif de la soirée : trouver un amant. Quitte à payer. Et ensuite le convaincre de l’accueillir chez lui pour quelques jours. Quitte à payer.

Coralie ferme la porte derrière elle et s’avance à pas mesurés vers un week end de débauche. Un truc qu’elle n’a jamais fait. Elle n’en revient pas de ce qu’elle se prépare à accomplir. D’ailleurs, au fond d’elle-même, elle doute d’être véritablement capable d’aller jusqu’au bout de sa décision. Tromper Lucas. Quitte à payer pour ça.

Son visage s’éclaire d’un sourire sardonique lorsqu’elle entend au travers de la porte son téléphone sonner.

C’est Lucas. Il a du avoir son message et doit commencer à paniquer.

Pour elle, c’est le signal. Elle appuie sur le bouton de l’ascenseur et se lance vers l’inconnu.