Vues: 316 Created: 2016.10.26 Mis à jour: 2016.10.26

Eudes et Johann

Chapitre 6

Le baiser de Johann m’avait profondément troublé, beaucoup plus que sa trop courte fellation (bon, c’était de ma faute). J’avais eu beaucoup de peine à m’endormir et j’avais réfléchi une bonne partie de la nuit à ce qui s’était passé pendant la journée précédente.

Je rêvais que je sodomisais mon valet lorsque je me réveillai. C’était un bruit qui m’avait réveillé : les domestiques apportant une bassine d’eau chaude. Ce n’était pas la journée du bain, était-ce une nouvelle habitude ? Ma mère trouvait-elle que mon hygiène laissait à désirer ?

J’ouvris les yeux et je vis que mon valet était devant ma bibliothèque, un livre à la main.

— Bonjour, Eudes, me dit-il, avez-vous bien dormi ?

— Très bien, la nuit a été un peu courte, j’ai beaucoup pensé à toi. Tu regardes un livre ? Tu en as choisi un en français, il s’agit de la Dissertation sur les maladies produites par la masturbation, de Samuel Auguste Tissot, un livre offert par ma mère il y a quelques années. Je n’ai pas vraiment suivi ces conseils et je suis pourtant en pleine forme. Je pourrais t’apprendre à lire et à écrire, nous commencerons par l’allemand.

— Comme vous le voudrez, Eudes.

Il me sembla que sa voix avait un soupçon d’ironie. Johann vint vers moi et me tendit le pot de chambre.

— Je ne vous ai pas demandé hier, me questionna-t-il, dois-je tenir votre pénis lorsque vous urinez ?

— Ce n’est pas nécessaire, cela me ferait bander.

J’enlevai ma chemise de nuit et allai dans la bassine, Johann me savonna le pénis et l’anus, il avait vite appris. J’eus immédiatement une érection.

Quelqu’un entra sans frapper à ce moment-là. Ce n’était pas ma mère comme à son habitude, c’était mon père.

— Bonjour, Monsieur mon père, bégayai-je.

— Bonjour, mon fils. Je te dérange ?

— Je suis surpris de votre visite, mon père. Vous n’avez pas l’habitude de passer si tôt le matin.

— Il est déjà 9 heures. Je pense que ton père a aussi le droit de voir son fils bander, pas seulement ta mère. Oui, elle est plus longue que la mienne, comme on me l’a dit, mais pas de péché d’orgueil, j’en ai vu des plus grosses.

— Je vous crois, mon père. Je ferai preuve d’humilité.

— C’est bien. Je voulais aussi te demander si tu étais content de ton nouveau valet ?

— Tout à fait, vous l’avez bien choisi.

— Oh, cela n’a pas été trop difficile, c’est lui qui m’a écrit pour proposer ses services.

— Johann… il vous a écrit ?

— C’est exact. Je te prierais également de ne plus mentir à ta mère, tu es son seul fils, elle s’inquiète simplement de notre descendance, elle n’a pas encore compris que la noblesse et ses privilèges vont disparaître, les paysans et les ouvriers vont prendre le pouvoir.

— Vous le pensez vraiment, mon père ?

— Pas tout de suite, mais certainement dans quelques décennies. Réfléchis à ton avenir, ne pense pas qu’au sexe.

— Bien, mon père.

— Encore une chose, j’ai un cadeau d’anniversaire pour toi.

Il me tendit une fiole en m’expliquant :

— Ce n’est pas un philtre t’amour, juste un onguent pour faciliter la pénétration. Tu me comprends, je ne vais pas te faire un dessin.

— Merci mon père, si je n’étais pas dans cette tenue je vous sauterais au cou comme quand j’étais petit.

— Juste un bisou alors.

Mon père s’approcha. Il en profita pour prendre ma bite dans sa main, en évalua la dureté, tâta les bourses. Je lui fis un bisou.

— Ta mère t’attend pour aller au temple. Et puis non, je lui dirai que tu es souffrant, je pense que vous avez beaucoup de choses à vous dire.

Mon père sortit. Comme je parlais en dialecte avec lui, Johann avait tout compris.

— As-tu remarqué quelque chose, lui demandai-je immédiatement ?

— Non, me répondit-il.

— Tu ne pouvais pas savoir, mon père m’a tutoyé, c’était la première fois.

— Et moi, puis-je vous tutoyer, Eudes ?

— Au point où nous en sommes… Oui, mais seulement en privé.

— Merci Eudes.

Mon valet m’apporta un linge et me sécha. Je m’assis ensuite sur mon lit sans me rhabiller car il faisait très chaud et lui dis de venir à côté de moi.

— Pourquoi ne m’as-tu pas dit que c’est toi qui as écrit à mon père ?

— Parce que tu ne m’as pas demandé.

— Logique. Ainsi tu sais lire et écrire.

— Oui. Aussi le latin et le grec, tu pourras encore m’apprendre le français.

— Mais qui t’a appris ?

— Je n’ai pas de livres à la maison. J’ai demandé au pasteur si je pourrais aller chez lui pour lire, il m’a enseigné le latin et le grec.

— Dans quel but ?

— J’ai deux frères plus âgés, je ne vais donc pas reprendre le domaine. Le pasteur a même pensé que je pourrais faire des études de théologie, il était prêt à les payer car il sait que mes parents n’ont pas les moyens.

— Mais pourquoi as-tu renoncé pour devenir un simple valet ?

— En grandissant j’ai constaté que je ne croyais plus en Dieu, et que j’aimais les hommes. Je ne voulais pas jouer la comédie toute ma vie.

— Pourtant tu serais doué pour jouer la comédie. Moi qui pensais que tu étais un paysan un peu simplet.

— Je suis très timide et j’étais très impressionné hier matin.

— Raconte-moi la suite.

— J’ai appris que ton père allait choisir un valet parmi les habitants du village, c’est une ancienne tradition. J’ai donc écrit une lettre en cachette en proposant mes services. Je l’ai portée au château et j’allais la remettre à un domestique lorsque ton père a passé. Il a lu la lettre et m’a conduit dans son bureau. Nous avons eu une longue discussion, j’ai dû le convaincre et il m’a proposé un contrat.

— Savait-il que tu es, euh, un inverti ?

— À la fin de l’entretien il m’a dit : « Je pense que mon fils préfère les hommes aux femmes, cela ne m’étonnerait pas qu’il vous fasse des avances… sexuelles si vous me comprenez. Quelle serait votre réaction dans ce cas ? ».

— Et que lui as-tu répondu ?

— « J’en serais très honoré, Monsieur le Vicomte ».

— Johann, tu me mets dans l’embarras. J’avais bien envie de baiser avec un homme, je pensais que ce ne serait qu’un jeu, un maître qui s’amuse avec son valet. J’ai souvent entendu dire que ce sont les domestiques, de sexe féminin bien entendu, qui déniaisent les fils de nobles. Ma mère m’a d’ailleurs proposé de jouer les entremetteuses. Mon père a raison, je suis trop orgueilleux. Ton baiser de hier soir m’a ramené à la réalité. Mais pourquoi m’avoir choisi ? Tu aurais bien trouvé quelqu’un d’autre pour satisfaire tes envies sans entrer à son service. Pourquoi moi ?

— Parce que je t’aime Eudes, je t’ai toujours aimé, même si tu ne l’as jamais su.

Je fus très étonné de la déclaration d’amour de mon valet. Comment pouvait-il m’aimer depuis toujours alors que nous nous connaissions depuis un jour seulement ?

— M’aimer depuis toujours ? lui demandai-je. Que veux-tu dire ?

— Je ne suis qu’un fils de paysan et tu ne m’as jamais remarqué au milieu de nombreux autres. Par contre, toi, tu es le fils du Vicomte et tout le monde te connaît. Déjà tout petit je me promenais près de ton jardin lorsque tu y jouais et lorsque tu te baignais nu dans le bassin ou dans la rivière. Les autres enfants ricanaient, moi je te regardais, au début c’était surtout de l’envie.

Notre château était situé au bord de l’Aar. Mon père tenait à ce que la rive fût accessible à tous. Il faisait fermer le chemin uniquement lorsque nous avions des fêtes dans le jardin. Johann continua :

— Je te regardais aussi arriver au temple tous les dimanches matin en compagnie de ta mère et de tes soeurs, avec tes beaux habits. Vous entriez toujours les derniers et alliez devant à vos places réservées. Je m’asseyais dans le transept pour pouvoir t’observer pendant tout le service. J’ai bien compris que la curiosité, la jalousie, cédaient la place à l’admiration, puis à l’amour, à mesure que ton corps grandissait et s’embellissait.

J’étais sonné, sous le choc. Johann m’avait admiré et aimé toute sa vie. Au bout d’une minute ou deux, je lui répondis :

— Johann, je ne sais pas que te dire. Je n’aurais jamais pensé qu’une telle chose soit possible. Que vais-je faire ? Qu’allons-nous faire ?

— Eudes, si je t’ai choqué, restons-en là. Je vais te quitter et retourner à ma vie habituelle. J’essaierai de faire des études de théologie et je t’oublierai.

— Il n’en est pas question. Mon père t’a engagé et je ne veux pas te renvoyer.

— Alors je serai ton valet, je t’appellerai de nouveau « mon maître » et je t’admirerai sans plus te le dire.

— Il n’en est pas question non plus, ce serait ridicule.

— Qu’allons nous faire ?

— Faisons un bout de chemin ensemble, nous verrons bien ce que la vie nous réserve. Et nous devons encore essayer le cadeau d’anniversaire de mon père.

Johann avait les larmes aux yeux, moi aussi d’ailleurs, il me prit dans ses bras et m’embrassa longuement.

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clyso Il ya 7 ans