Vues: 287 Created: 2016.12.10 Mis à jour: 2016.12.10

Eudes et Johann

Chapitre 45

La salle était rectangulaire et avait une dizaine de tables de chaque côté. Le milieu était vide, à part une estrade de bois avec quatre torches pour l’éclairer. Le reste du local était plutôt sombre, une petite bougie était posée sur chaque table.

Le portier nous conduisit vers une table libre, les quatre chaises étaient disposées de manière à bien voir l’estrade. Nous posâmes les boîtes en face de nous. Mes yeux s’habituèrent à la pénombre. Les deux tiers des tables étaient occupées, en majorité par des hommes assez âgés. Un serveur vint nous demander ce que nous désirions boire, nous choisîmes une bouteille de vin rouge du canton.

Au bout de quelques minutes, un homme se leva et vint déposer une pièce dans ma boîte. Je le remerciai, j’étais surpris, mais, après réflexion, je me dis que c’était normal puisque nous étions les plus jeunes. Plusieurs autres hommes vinrent mettre une pièce, soit dans ma boîte, soit dans celle de Johann ou celle d’Olav. Cela fit sourire notre nouveau compagnon Frédéric :

— Vous n’allez pas y couper, avec tous ces vieux dans la salle.

— Ne t’en fais pas, répondis-je, nous avons l’habitude.

Un employé sonna une cloche, il s’approcha directement de notre table puisque nous étions les seuls à avoir de l’argent dans les boîtes. Il les ouvrit les unes après les autres et compta les pièces devant nous, puis les remit à l’intérieur. Il nota les montants sur un papier et nous fit signer pour confirmer. Il me dit ensuite :

— C’est à vous, Monsieur, vous en avez le plus.

Il reprit ma boîte et me demanda encore :

— Je vous en redonne la moitié ?

— Non, vous offrirez une tournée.

— Merci, Monsieur.

C’était la règle du jeu que le portier nous avait expliquée. La personne désignée pouvait garder la moitié pour elle. C’était aussi très apprécié d’offrir une tournée. Un musicien avec une viole entra, prit une chaise, s’assit à côté de l’estrade. Il m’invita à me rapprocher. J’avais dit à Frédéric que j’avais l’habitude, mais cette fois c’était un peu différent. Il ne fallait pas simplement me déshabiller, mais essayer de le faire élégamment. Je fus encouragé par les applaudissements des spectateurs lorsque je montai sur l’estrade. Le musicien commença à jouer.

J’avais mis des habits très simples pour voyager, j’enlevai tout d’abord ma veste, je ne savais pas où la poser, le musicien me fit signe de la mettre par terre. J’esquissai quelques mouvements de danse maladroits, puis j’ôtai ma chemise. Je n’étais pas très musclé et j’eus un peu honte, même si j’avais quand même fait des progrès avec la gymnastique quotidienne au pensionnat. Je décidai d’accélérer, j’enlevai mes souliers et mes chaussettes, puis mes pantalons. J’entendis des exclamations dans l’assistance, toujours l’effet des caleçons dessinés par Johann.

Le portier ne nous avait pas précisé si l’on devait se déshabiller entièrement ou pas. Je fis durer un peu le plaisir, passant une main sur l’étoffe de mon caleçon, puis la glissant à l’intérieur. Le musicien jouait toujours plus rapidement, je finis par me dénuder très lentement. Tonnerre d’applaudissements dans la salle, je ne savais s’ils étaient vraiment mérités, mon sexe n’avait rien de spécial et je ne bandai pas, bien au contraire. Le musicien arrêta de jouer et je saluai. Je ramassai mes habits et retournai à notre table pour me rhabiller.

— Parfait, me dit Olav. Tu vas bientôt pouvoir te produire sur une scène.

— Je ne pense pas, répondis-je. Je devais avoir l’air ridicule.

— Cela ne fait rien, ils voulaient juste te voir à poil.

Un homme s’approcha de notre table :

— Bonsoir, Monsieur, me demanda-t-il, pourriez-vous me dire d’où vient votre caleçon ?

— Bonsoir, Monsieur, répondis-je, c’est une dame de mon village qui les fait, mais une manufacture en produira aussi dans quelques mois.

— C’est une excellente idée, j’ai une boutique d’habits ici à Zurich et je vais en commander. Je suis sûr qu’ils auront du succès. Pourriez-vous m’indiquer le nom de cette entreprise ?

— C’est la filature Zimmerli d’Amriswil, en Turgovie, dit Johann. Nous allons y passer dans quelques jours pour en discuter.

— Parfait, Messieurs, je leur écrirai.

— Merci beaucoup, Monsieur, dit encore mon ami.

L’homme nous laissa seuls.

— Eh bien, dis-je à Johann, ce déshabillage n’a pas été inutile, tu vas devenir riche.

J’expliquai ensuite à Frédéric d’où provenaient nos sous-vêtements. Au bout d’un quart d’heure, la cloche sonna à nouveau. Les boîtes de Johann et Olav s’étaient encore remplies de pièces et ce fut Johann qui en eut le plus. Il se prêta au jeu de la mise à nu, il me sembla que son corps eut plus de succès que le mien, d’autant plus qu’il bandait lorsqu’il enleva son caleçon, provoquant des sifflets dans la salle. Frédéric lui dit ensuite :

— Je t’envie, comment peux-tu être aussi naturel dans une telle situation ? Je n’aurais jamais osé le faire et je serais mort de honte. Et tu as un si beau sexe.

— Tu peux le toucher, lui dit Johann.

Frédéric tendit la main et le toucha brièvement.

— Non, ne me tente pas. Ma décision est prise, je ne vais pas revenir en arrière.

— La soirée n’est pas encore finie, dis-je.

Ce fut évidemment Olav qui fut choisi une demi-heure plus tard. Il avait déjà l’aisance d’un comédien lorsqu’il se déshabilla. Ce n’était pas très spontané. Une fois nu, il resta sur l’estrade et se mit à chanter, tout le monde fut surpris, les conversations cessèrent pour l’écouter. Il fut acclamé, il ne se fit pas prier pour nous offrir tout son répertoire. Par contre, personne ne vint l’engager pour un récital.

Nous quittâmes le Wunderbar assez tard, d’autres candidats au déshabillage étaient arrivés, je pensai que ceux-ci étaient là pour gagner leur vie et pas pour s’amuser.

Nous retournâmes à l’auberge. Je remerciai le réceptionniste pour ses bons conseils. Je lui demandai si l’on pouvait encore boire un verre dans la chambre, la taverne étant déjà fermée. Il nous servit une bouteille. Je demandai ensuite à Frédéric :

— Viens-tu un moment dans notre chambre ?

— Je ne sais pas, me répondit-il. J’ai peur d’être soumis à la tentation. J’ai déjà vu vos beaux corps.

— Tu ne seras pas obligé de rester, tu pourras t’en aller quand tu le voudras, ou seulement regarder sans participer. Entre les trois, nous avons décidé de ne pas avoir des relations complètes, pas de pénétrations, juste de la tendresse.

— Dans ce cas, je viens un moment, on verra bien.

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clyso Il ya 7 ans  
arthur Il ya 7 ans