J'imagine tout d'abord le ressenti de la patiente dès qu'elle pousse la porte d'entrée du bâtiment où se trouve le cabinet de son gynécologue. Dès qu'elle rentre elle sent ce parfum aseptisé propre à tout bâtiment médical, ce parfum qui lui met un leger haut le cœur et une légère pointe d'angoisse, car lui rappellant qu'elle rentre dans un lieu où elle n'est plus dans sa "zone de confort", un lieu où le chef est un gynécologue à qui elle devra obéir aux ordres, qui d'ici quelques dizaines de minutes va lui demander de se mettre entièrement nue, qui d'ici quelques minutes va entrer dans son intimité la plus profonde et palper tout ce qui fait d'elle une femme. Le compte à rebours, implacable, est démarré.
J'imagine la secrétaire médicale, qui tout au long de la journée va croiser le regard de toutes ces femmes qui defilent devant elle. Elle va échanger avec elles des informations, adresses, numéro de téléphone, de sécurité sociale, bref des banalités, tout en imaginant le sort qui les attend d'ici peu...
J'imagine cette patiente dans la salle d'attente. Elle a vu rentrer il y a quelques minutes dans le cabinet du gynécologue la patiente qui était avant elle: elle sait désormais que la prochaine sera elle, ce qui l'angoisse un peu. Pour tromper cette angoisse, elle prend un de ces magazines qui traînent sur la table basse couleur rouge vif. Elle y lit des recettes, fait mine de s'y intéresser, mais n'arrive pas à se concentrer, car son cœur bat toujours plus vite en voyant l'heure défiler sur cette montre qu'elle regarde toujours plus. Finalement, elle renonce et dépose le magazine là où il était, lâchant prise et se préparant psychologiquement à cet examen où elle devra abandonner, soumise et responsable à la fois, son corps entièrement nu au soins de la médecine.
Et puis d'un coup ce grincement de porte léger mais strident et son prenom, épelé par le médecin, prenom qui résonne doucement mais fermement, ouvrant la place à cet examen à la fois si attendu et si redouté qu'est l'examen gynécologique.