Une donatrice importante
Partie 1
Comme je l'ai déjà écrit ici, je travaille depuis très longtemps, dans un association, loi 1901. Je m'occupe des personnes âgées, et les aide dans les démarches administratives, l'accompagnement social, le rangement de documents...
C'est dans ce dernier domaine que m'est arrivée cette aventure, à laquelle j'ai mis fin par moi-même, quitte à risquer mon emploi, ce faisant. Je me suis senti agressé, manipulé, je ne suis pas formé pour gérer ce genre de situation : j'ai exercé mon droit de retrait.
Voilà l'histoire de Mme V. donatrice très importante de notre association, mécène qui distribue ses biens à des centaines d'oeuvres de bienfaisance et de protection des animaux.... L'histoire se déroule sur un an environ, de novembre 2015 à septembre 2016 à raison d'une visite à son domicile par mois. Un accord, à mon insu, imposé par la Direction a été signé entre elle et la directrice, pour me mettre à sa disposition.
Mme V. est une ancienne chef de clinique de l'APHP. Elle revendique encore et toujours son métier de médecin, bien qu'elle n'exerce plus.
La directrice générale me convoque un jour à son bureau, me raconte la vie de Mme V., qui a légué en héritage deux appartements à l'association, un dans le 8ème arrondissement de Paris, le second, dans le 2ème de Marseille. Bien évidemment, mon travail va se dérouler à Paris, où la DG me charge donc, de venir en aide à cette dame, généreuse donatrice, bienfaitrice au plus haut niveau (dixit la patronne), et de classer et ranger ses documents, papiers, revues, etc... accumulés depuis de nombreuses années. L'association aussi, bénéficie des subsides de l'ISF que Mme V. verse.
J'accepte, un peu à contre-coeur. Je fais part de ma réserve à Christine, ma chef de service, qui comprend ma position, mais à qui on a aussi fait pression, pour qu'elle accepte ma mise à disposition pour le Dr V. Il en va de la survie de l'association, etc... Je me laisse amadouer et je me rends chez Mme V. qui tient à ce qu'on l'appelle encore par son titre de docteur !
Ma première visite est surprenante. Mme V. qui sait que je dois venir, ne me donne pas le code d'accès à son immeuble, elle me demande de l'appeler une fois en bas, et de là, elle me communiquera cette information. Et c'est ce qui se passe : le docteur V. m'accueille chez elle, et est présente aussi, je l'entends mais ne la vois pas pour le moment, une aide ménagère dans une autre pièce.
L'appartement est vaste, mais mal entretenu : moquette usagée et décollée par endroit, tout comme les peintures ou le papiers peints. Mme V. n'a pas de télévision, d'ordinateur et pas d'accès à un réseau Internet. On dirait qu'elle vit au 19ème siècle...
Ce jour-là, Mme V. se déplace avec une canne, venant de chuter dans son appartement. Elle se déplace lentement et me prie de la suivre dans la pièce où le travail m'attend. Elle se laisse tomber sur un fauteuil, et me prie de prendre place en face d'elle.
Je ne me sens pas très bien, je n'y crois pas trop, mais j'ai l'impression que cette dame lâche des ondes négatives... j'ai peur et elle le vois.
Mme V. a peur de tout, des récents attentats de Paris (on est quelques jours après le Bataclan). Elle ne sort plus de chez elle...
Brusquement surgie de nulle part, apparaît Anita, l'aide ménagère de Mme V. en... petite tenue : elle travaille en culotte et soutif, et cela ne semble pas la déranger, tout comme ma présence... Je détourne les yeux et quand Anita se retire (elle est venue par là pour vider le sac de l'aspirateur), Mme V. me dit :
- Tout mon personnel est comme ça chez moi. En tant que médecin, ça ne me fait rien de voir des gens nus ou presque. D'ailleurs, ça me manque... Alors voilà... Anita est roumaine, et je lui ai confisqué ses papiers. Elle vient travailler chez moi à mes conditions. Si elle ne veut pas, dehors, ouste.
J'ai été offusqué par les propos de Mme V. Qu'allait-il m'arriver ? Qu'allait-elle faire de moi ? J'avais de plus en plus peur...
Mme V. prit un bloc-notes et me posa des tas de questions. Et quand Anita passait ou repassait par la pièce dans laquelle j'étais, je ne pouvais pas m'empêcher de la regarder, surtout qu'elle était bien faite. Mais je compatissais aussi à sa douleur.
A la fin de cet interrogatoire, Mme V. me dit :
- Vous n'avez rien sur vous ? Pas d'arme, pas de produits dangereux, pas de drogue ?
- Mais non, enfin, quelle idée ! Vous savez bien qui m'envoie chez vous...
Je n'ai pas pu finir ma phrase, que Mme V. rétorqua :
- Et qui me dit que c'est bien vous que j'attends ?
Je m'apprêtais à partir, mais Mme V. déclara :
- Vous ne pouvez pas sortir. Ma porte a un code et moi seule le connais. Restez ici, c'est moi qui commande.
Je me suis enfoncé dans le canapé, tremblant de peur.
Mme V. commanda :
- Levez-vous et approchez-vous.
Je n'ai pu qu'obéir, étant fait comme un rat dans cette appartement du 6ème étage.
- Ecartez les bras, jeune homme. Et les jambes aussi.
Deuxième obéissance.
Mme V., sans quitter son fauteuil, saisit sa canne et avec le bout, palpa ma poitrine, mon abdomen. Elle la passa ensuite entre mes jambes et entre mes aisselles, puis elle dit :
- Tout va bien. Vous pouvez vous rasseoir.
Un long silence s'ensuit, rompu bien vite par Anita, qui avait fini son travail. Elle se présenta à nouveau à Mme V. toujours en petite tenue. Je ne pouvais pas ne pas la regarder : pauvre Anita, elle semblait résignée... et ce n'est pas mon regard qui la mettait mal à l'aise !
Mme V. du bout de sa canne, ouvrit une espèce de coffre qui était à sa droite, et dans lequel se trouvaient... les vêtements d'Anita, qui les prit et qui se rhabilla sur place, sans aller dans une autre pièce. Mme V. l'accompagna à la porte, puis, après le départ d'Anita, elle vint me retrouver :
- Elle travaille bien, Anita. Elle est très agréable. Elle fait tout ce que je lui dis. C'est moi qui la rhabille en général, mais en ce moment, je ne peux pas. Je ne veux pas qu'elle prenne des choses de chez moi en partant. Alors, c'est moi qui lui rends ses vêtements.
Puis, après un silence, elle m'expliqua ce qu'elle attendait de moi : un gros rangement et un énorme tri de documents disséminés dans tout l'appartement (il comprenait 9 pièces), appartement dans lequel vivaient ses parents mais qui ne lui servit pas de lieu d'exercice.
J'ai commencé ma tâche, mais Mme V. surveillait tout mes faits et gestes, contrôlait chaque document, chaque papier. Elle a conservé des facturettes de magasins, des talons de carte bancaire quand elle faisait des courses pour ses parents... Elle ne veut rien jeter, rien détruire.
Au moment de partir, après près de deux heures passées chez elle, elle me dit :
- Vous n'avez rien pris de chez moi ?
- Mais enfin, Madame...
- Pas madame, docteur, s'il vous plait...
-... Docteur, vous n'avez pas bougé de votre place. Vous l'auriez vu, non, si j'ai pris quelque chose.
- Je tiens à vous fouiller, monsieur. Sinon, vous ne partirez pas d'ici.
J'ai voulu appeler de mon portable, mais comme je l'ai dit plus haut, Mme V. n'a pas de réseau. D'un air sournois, elle me dit :
- C'est moi qui décide, ici. Je dois vous fouiller. Sinon...
J'ai baissé les bras, Mme V. marquait un point.
Avec difficulté, elle s'est levée de son canapé, s'appuyant sur sa canne, et m'a commandé de m'allonger sur une méridienne, ce que j'ai fait en tremblant. Mme V. vint m'y rejoindre quelques minutes plus tard, marchant très lentement : il lui a fallu plus de deux minutes pour parcourir 4 à 5 mètres. Ce jour-là, je portais une veste polaire qui s'ouvrait par une fermeture à glissière, et un jean, comme souvent. Une fois près de moi, Mme V. dit :
- Ouvrez votre chemise et votre pantalon, s'il vous plait. Je vous rappelle que je suis médecin au cas où vous l'auriez oublié.
Peut-être, mais moi, je ne suis pas malade, pensai-je !
J'ai fais ce qu'elle m'a dit, mais cela ne lui suffisait pas : j'ai bien écarté les pans de ma veste polaire et bien laissé apparaître mon slip, dans sa presque totalité. Mme V. une main sur sa canne, l'autre sur moi, palpa et tapota un peu partout. Puis elle me permis de me rhabiller, avec en note, un rendez-vous le mois prochain.
Effectivement, la porte d'entrée de son logement est munie d'un code qu'elle m'a interdit d'enregistrer ou de noter.
De retour au service, j'étais dans l'embarras : comment raconter ce qui se passe chez cette personne ? Parce qu'elle est donatrice, elle a tous les droits ? Je suis prêt à démissionner si ça continue.
Le mois suivant, décembre 2015 : ce jour-là, je suis tout seul. Pas d'Anita, qui n'est pas là, je ne sais pas pourquoi. Mme V. me demande :
- Vous êtes venu comment ?
- En métro.
- Et vous avez trouvé du monde ? Vous avez tenu la barre centrale ?
- Non, pas trop. J'étais assis après la correspondance.
- Alors, allez prendre une douche. J'ai trop peur des microbes. En tant qu'ancien médecin, je sais de quoi je parle.
- Mais enfin, Mme V.
- Non, il n'y a pas de Mme V. Faites ce que je vous dis, ou j'appelle Mme C. (la directrice). J'ai tous ses numéros, au cas où vous ne le sauriez pas.
- Mais je n'ai pas de... (vêtements de rechange, voulais-je dire).
- Ca suffit, faites ce que je vous dit. Je ne veux rien savoir.
Joignant le geste à la parole, elle m'indique le chemin de la salle de bain, dans laquelle j'entre, une salle de bain toute luxueuse : robinets en or, carrelage et marbre... mais sans porte, juste un rideau séparait cette pièce du reste de l'appartement. Mme V. m'attendait à l'extérieur bien entendu. Elle avait mis à ma disposition un drap de bain et un peignoir pour que je puisse me sécher, mais elle m'obligea à sortir dans cette tenue et à me rhabiller dans une autre pièce, dans laquelle elle avait déposé mes vêtements. Là aussi, elle a attendu à l'extérieur, mais n'a pas complètement fermé la porte. Elle dit :
- J'ai vu tellement de gens nus dans ma vie. Pour moi, c'était mon instrument de travail, comme vous l'ordinateur...
Elle oui, mais pas moi...
Rhabillé, je sors de cette pièce et me je ne me sens pas du tout à mon aise. Je continue ce que j'ai fait la première fois, Mme V. étant toujours aussi méticuleuse, aussi précautionneuse que l'autre fois. J'ai hâte d'en finir.
Au bout de deux heures, je mets fin à mon travail, mais Mme V. joue la même scène que l'autre fois. Je proteste, lui disant que j'ai fait ce qu'elle m'a dit, qu'elle n'a pas bougé de sa place... Mme V. hurle, monte sur ses grands chevaux, me menaçant à nouveau d'appeler ma patronne.
Je cède et me plie à ses exigences.
Mme V. qui n'a pas de canne, mais qui se déplace difficilement, me tire l'oreille et dit :
- Je vais vous apprendre, moi, à obéir.
Ce faisant, elle agite ma tête de droite à gauche tout en continuant à me pincer l'oreille droite. J'avais envie, et j'ai, pleuré. Mme V. a immédiatement cessé de me tirer l'oreille et a dit :
- Je dois vous punir. A poil. Et vite. Enlevez tout ce que vous avez sur vous. Je veux vous voir nu. Et quand je dis nu, c'est TOUT nu. Obéissez et vite.
Je n'ai rien pu faire d'autre que d'exécuter l'ordre de Mme V. toujours avec des larmes aux yeux. Mais Mme V. s'en fichait...
Très belle introduction pour une histoi…
Une histoire de bénévolat atypique !