Bertrand
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Vues: 655 Created: 2012.04.05 Mis à jour: 2012.04.05

La danse du martinet

Part 2

Après ce cours mouvementé où Marie-Odile, la cadette, reçut le martinet, une certaine routine reprit. Une fois par semaine, je venais accompagner de mes improvisations pianistiques plus ou moins inspirées les évolutions gracieuses des trois filles de Marie-Thérèse :

Marie-Agnès, l’aînée, 18 ans, la plus discrète et dont j’ai déjà vanté dans le premier récit le généreux postérieur ;

Marie-Clémence, 16 ans, plus petite, plus mince, aux yeux noirs, la plus sensuelle, la plus douée pour la danse, une grâce naturelle ;

Marie-Odile, 14 ans, petite peste adorable et très agaçante.

Malgré le charme de ces demoiselles, je commençais à trouver cet emploi bien monotone. La fessée donnée à Marie-Odile avait été un événement qui ne s’était pas reproduit.

En revanche, les cours à Paris m’intéressaient davantage. Je finis par sympathiser avec l’une des jeunes danseuses, plus libre et plus intellectuelle que les autres. Nous étions loin de l’atmosphère pesante de discipline qu’imposait Marie-Thérèse à ses trois filles.

Et puis il y avait mes études. Toutes ces jeunes danseuses étaient bien agréables à regarder, mais les choses devenaient plus sérieuses au fur et à mesure que l’année progressait et que l’échéance des examens approchait.

Pour tout arranger, Marie-Thérèse commençait à critiquer ma façon de jouer ainsi que mes choix musicaux. Il est vrai que je travaillais beaucoup, dormais peu et que je n’étais pas toujours en forme pour jouer deux heures de suite. Je n’étais pas tout à fait un vrai pianiste et mon répertoire assez limité devenait lassant à force d’être répété.

De plus, les goûts de Marie-Thérèse étaient plus proches du Second Empire que de notre époque (1972) et lorsque j’entrepris de jouer l’introduction de « Love me » de Polnareff, pourtant très classique, elle me reprocha amèrement d’utiliser la musique d’un « beatnik » ! Sacrée Marie-Thérèse !

Tout cela n’était guère engageant et j’avais bien envie d’arrêter cette activité, mais il suffisait que je contemple ces trois grâces faire leurs mouvements à la barre pour faire vaciller ma décision. Lorsque je pouvais les regarder se pencher, j’apercevais le début de leurs poitrines et il ne m’en fallait pas plus pour enflammer mon imagination. En général, j’évitais d’être vu par la mère et mes regards étaient les plus discrets possibles, mais je pense qu’elle n’était pas dupe. Ensuite, comme pour tout exercice à la barre, ses trois filles faisaient la même chose de l’autre côté. Et là le spectacle était tout aussi enthousiasmant lorsque penchées, elles semblaient offrir à mon regard leurs cuisses, leurs jolis mollets, leurs cous-de-pied parfaitement tendus et, surtout, leurs jolis postérieurs !

J’aimais particulièrement la silhouette de Marie-Clémence. C’est elle qui avait le plus de distinction, et qui possédait vraiment le style de la danseuse classique. Curieusement, ou à cause de cela, c’est elle qui essuyait les critiques les plus dures de Marie-Thérèse, critiques qui la mettaient au bord des larmes.

Lorsque les trois sœurs revenaient à la position initiale, me faisant face, je pouvais observer un curieux jeu de Marie-Clémence. Pendant les exercices, elle semblait me regarder de façon insistante, comme par en dessous, ces grands yeux noirs me scrutant. Il y avait quelque chose qui me faisait particulièrement de l’effet : pendant un mouvement particulièrement ample des bras ou du torse, elle prenait sa respiration en écartant ses narines, ce qui lui donnait une beauté encore plus sensuelle.

Pendant un cours, Marie-Clémence recommença son petit jeu à la barre et tout en jouant, je lui envoyais quelques coups d’œil en réponse à ses regards. Mais soudain, je fus réveillé de ma douce rêverie par une voix dure :

« Mais qu’est ce que c’est que cette musique ! Comment pouvons-nous danser avec une telle bouillie, il n’y a pas de rythme, pas de mélodie, rien ! Reprenez-vous Bertrand ! »

« Hi hi hi fit Marie-Odile, le pianiste se fait gronder ! »

« Et vous, taisez vous ! Sinon je lui demanderais de jouer la « Danse du martinet » comme l’autre jour. Pouvez-vous nous jouer ce morceau Bertrand ? »

« Heu, pardon, je ne vois pas de quel morceau il s’agit. »

« Mais si voyons, il y a un mois quand j’ai donné le fouet à Marie-Odile, vous avez accompagné en cadence la fessée, vous vous souvenez j’espère, avec les « tigidigidi-vlan ». » ?

« Peut-être, répondis-je hésitant, en fait je ne suis pas sûr de retrouver cette musique. »

« Décidemment vous me décevez. Essayez de la retrouver néanmoins, ou quelque chose d’approchant. Il faut que cela soit entraînant pour la personne qui manie le martinet, au cas où. »

Marie-Thérèse en resta là et reprit les exercices comme si de rien n’était.

En revanche, Marie-Clémence, elle, avait changé d’attitude et restait concentrée sur ses exercices, sans un regard pour moi. De mon côté je n’avais pas du tout apprécié le ton de Marie-Thérèse. Mais, très intrigué quand même par ce qu’elle avait dit, je me demandais : allais-je assister et participer en musique à une deuxième fessée ?

Après le cours, je dis au revoir à Marie-Thérèse qui me proposa de rester à dîner. Je déclinais poliment l’invitation car j’avais trop de travail.

« C’est dommage, me dit-elle en riant, vous auriez pu assister à la fessée ! Une vraie fessée déculottée ! »

« Mais ce n’est pas juste, s’écria Marie-Odile qui se sentait visée par cette allusion. J’ai simplement dit que Bertrand se faisait gronder ! »

« Je ne parle pas de vous, petite sotte. C’est l’attitude de Marie-Clémence que je veux corriger. »

Marie-Clémence se mit à rougir. La regardant, sa mère continua :

« Vous faites beaucoup de simagrées qui ne me plaisent pas du tout, si vous voyez ce que je veux dire. »

Le rouge aux joues de Marie-Clémence devint écarlate et envahit tout le visage jusqu’au bout des oreilles.

« Et ces simagrées, pour tout arranger, distraient notre pianiste qui ne peut, à cause de vous jouer, proprement. »

La pauvre accusée commençait à défaillir, ce genre de discours présageant une fessée en règle autrement plus sévère que celle de Marie-Odile.

« Bon, inutile de vous retarder, vous avez du travail, mais essayez de retrouver la « Danse du martinet. »

Je quittais les lieux plein d’interrogations et d’espoir. Plus tard, je m’en voulus de n’être pas resté. Peut-être que la mère ne plaisantait pas et que j’aurais assisté à une fessée.

La semaine suivante je me rendis donc chez Marie-Thérèse comme d’habitude.

Celle-ci m’accueillit avec deux de ses filles : l’aînée et la cadette, toutes deux en tenue de danse. L’absence de la deuxième, qui avait été vertement sermonnée la semaine dernière, ne manqua pas de me mettre la puce à l’oreille.

« Bertrand, me dit la mère, Marie-Clémence n’a pas été punie pendant le dernier cours. En effet, fesser par-dessus le collant de danse n’a pas beaucoup de sens et je regrette d’ailleurs d’avoir corrigé ainsi Marie-Odile l’autre jour. Aussi, pour que vous ne me preniez pas pour une mère qui laisse tout passer à ses filles, je tiens à ce que Marie -Clémence reçoive devant vous une fessée déculottée. Venez avec moi. »

À ce moment, elle prit le martinet qui était posé non loin de là.

Je suivis donc cette femme sévère pour rejoindre la salle de danse où Marie-Clémence se tenait les yeux baissés, en tenue de ville très classique selon les goûts de la mère, mais ayant néanmoins les pointes aux pieds. Au geste de sa mère, elle se mit en position pour recevoir sa correction. Je compris que j’étais là pour jouer cette petite pièce qui avait tant plu et me je me mis au piano.

Résignée, Marie-Clémence s’approcha des barres, posa ses mains sur la plus basse d’entre elles et se mit sur pointes, les jambes bien tendues tout en se penchant le plus possible dans une position permettant de bien mettre en valeur la partie du corps châtiée.

« Plus cambrée ! Les fesses bien hautes, dit la mère. 1, 2, 3 et… »

Je commençais à jouer la courte introduction et, tout en jouant, j’entendais, scander en rythme par la voix douloureuse de Marie-Clémence les mots suivants :

« Pan… sur… les… fesses

Un… âne… bâ… té

Ne… com… prend… que

Le… mar… ti… net »

Les coups tombaient en cadence pendant que je continuais à jouer sans vraiment voir le spectacle, le piano étant placé de telle façon (sans doute intentionnellement) que, à mon grand dam, je tourne le dos à l’action.

Après une dizaine de coups, le texte ânonné toujours plus difficilement par la pauvre danseuse changea quelque peu :

« Pour… que… mes… fesses

Soient… bien… châ… tiées

Il… faut… qu’elles… soient

Dé… cu… lot… tées »

La répétition en rythme d’un texte aussi ridicule ne faisait qu’ajouter à l’humiliation.

Mais surtout ceci me rappela ce que je ne voyais pas : Marie-Clémence recevait en ce moment la fessée déculottée !

Imperturbable (en apparence), je continuais de jouer énergiquement une sorte de marche ponctuée de ces fameux « tigidigidi-vlan » qui avaient tant plu à Marie-Thérèse. De temps en temps, comme pour les exercices de danse, je jetais un coup d’œil vers elle pour savoir si le morceau se terminait ou si je reprenais pour un tour. Au bout d’une trentaine de coups de martinet j’entendis dans le ton de la voix de la fesseuse qu’on touchait à la fin de la punition.

« Bien, et maintenant veuillez rejoindre le piquet pour réfléchir à votre comportement » dit Marie-Thérèse en prenant soin d’attacher la jupe de sa fille afin de la maintenir retroussée. Je pus alors contempler l’œuvre du martinet sur ses fesses, plus rebondies que je ne le pensais. La mère n’y avait pas été de main morte, les stries écarlates en étant la preuve.

Marie-Clémence obéit et se dirigea vers un coin de la pièce où un crochet sur le mur semblait tout destiné pour suspendre le martinet à côté de la punie.

Puis, laissant la malheureuse méditer sur son châtiment, ses deux sœurs se dirigèrent vers la barre pour commencer le cours. Au bout d’une demi-heure, Marie-Thérèse annonça à Marie-Clémence que la mise au piquet était terminée. Celle-ci sortit de la salle pour se préparer à rejoindre le cours. A son retour, elle commença les exercices de son côté, les yeux baissés et un peu rougis, sans la moindre tentative d’attirer l’attention sur elle et sans un regard pour moi.

Le cours se passa très calmement, comme le calme après la tempête. À la fin, j’eus droit à la révérence des élèves et Marie-Clémence demanda pardon sous le regard curieusement attendri de la mère.

Je sortis de la demeure plein de sentiments contradictoires pour la belle Marie-Clémence. J’en étais amoureux. Mais de laquelle ? Celle qui me faisait des œillades au risque de subir les foudres de sa mère et les lanières du martinet ? Ou la sage danseuse domptée par ces mêmes foudres et ces mêmes lanières ? J’en étais à ces interrogations au courant du mois de décembre.